Que vit un auteur en devenir alors qu’il était traducteur auparavant ? Va-t-il réussir à s’affranchir des influences qu’il peut subir ? Va-t-il pouvoir trouver sa voix ?

Mais d’où t’es venue l’idée de lire ce livre ?

J’étais un peu en avance et l’auteur un peu en retard lors de la rencontre avec Claudie Hunzinger. Résultat des courses lorsqu’on se retrouve dans une librairie ? On achète des livres. Et j’ai choisi celui-ci, entre autres, car la libraire avait mis un mot enthousiaste sur la suite, Le traducteur amoureux. Il me fallait donc commencer par le début…

La quatrième de couv :

Un jour le narrateur, traducteur très consciencieux, remplace un point-virgule par une virgule. Il s’aperçoit de son erreur mais ne la corrige pas. Le voici sur une pente qui va le mener très loin. Dans les traductions suivantes, il change quelques détails ; l’éditeur n’y voit que du feu. Le traducteur glisse alors une phrase de son cru, puis plusieurs, apportant de nouvelles nuances aux œuvres traduites ce qui le conduit – et quel traducteur n’en a pas rêvé ? – à écrire son propre roman, expérience qui va lui réserver bien des surprises…

Mon avis :

Un traducteur, normalement, c’est quelqu’un qui se met au service du texte d’un auteur. « On doit se faire à l’autre, l’écouter, le comprendre, s’en imprégner, avec cette différence qu’au lieu d’un personnage, c’est un roman qu’il va falloir traduire. » Alors pourquoi donc notre narrateur remplace un point-virgule par une virgule ? Pourquoi ensuite va-t-il continuer à modifier de plus en plus les textes qu’il devrait seulement traduire ? Jusqu’à modifier des paragraphes complets ? Mais très vite, cela ne lui suffit plus et il finit par découvrir l’autre, celui qui veut écrire. Celui qui, d’un coup, force le chemin et s’impose naturellement avec quelque chose à transmettre.

Un premier roman refusé ne va pas l’arrêter, car il doit traduire un texte qui brusquement va lui amener l’inspiration. Mais ce texte à traduire, qu’il trouve lui magnifique, est relégué par ses amis libraires au rang de roman de gare à peine. Il finit par se poser des questions. Sur ce livre, sur ses qualités à lui en tant qu’écrivain. Alors de rencontres d’auteurs en réunions mondaines, il va finir par se perdre et par perdre sa foi en lui et en son écriture.

L’histoire semble légère au premier abord : un traducteur qui dépasse un peu le cadre de ses fonctions, il finit par écrire son propre roman, puis un deuxième au succès fulgurant, un troisième aussi qui marche bien. Mais finalement, est-ce que tout cela ne serait que la répétition de quelque chose qui a déjà été dit ? Ces textes sont-ils le reflet de qui est vraiment notre traducteur ? C’est sur ces routes que nous emmène voyager Jacques Gélat. Pour un très bon moment de lecture.

Extraits :

C’était toujours au moment de m’endormir, dans ce demi-sommeil où l’éveil parle encore. D’étranges phosphorescences apparaissaient devant mes yeux fermés. Des lettres se dessinaient, des mots se formaient. Ils allaient, venaient, s’entrechoquaient, combinaient de lentes bribes de phrases qui à leur tour s’entrelaçaient, se défaisaient, avant de disparaître pour revenir encore, jusqu’au moment où le sommeil m’emportait.

Détails :

Auteur : Jacques Gélat
Prix : Prix Gaillon 2006
Editeur : José Corti
Date de parution : 02/02/2006
127 pages

Gélat.

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