Je me dis qu’ici au moins je pourrais dormir. Parce que la sécheresse du béton, je me dis, et le mur tiède masqué par l’ombre ambiante, parce que ma main, main droite, parce que mes jambes qui me portent plus, parce que la peau qui craque quand j’y pense et même quand j’y pense pas, parce que je peux plus avancer

Respirer.

et que c’est trop dur

Foutu.

et que je vais m’écraser là. Parce que mes yeux ouverts, au fond, posés sur du vide et vidés par le fond, je me dis, ils pourraient aussi bien être fermés, qu’est-ce que ça changerait ? Parce que même bloqué sous mes paupières, j’aurais pu reconnaître de loin la silhouette de Nil qui s’approche par l’arrière et qui me tape sur l’épaule.

Je sais pas combien de temps on est resté assis par terre. Honnêtement je sais pas. Il s’est juste pointé et il s’est assis à côté de moi et il a accroché ses lunettes de ski sur sa tronche et on a regardé le sol ensemble. Des fois c’était le sol et des fois c’était le ciel. Et pas un mot, rien. On a juste attendu. Au bout d’un moment, je me suis rendu compte que ma main droite je la sentais plus. Ou bien que je la sentais mieux, je sais pas, c’est dur de trouver comment dire.

Coup de tête – Guillaume Vissac

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