Peut-être que vous, vous connaissez cet étrange mot. Moi, je l’ai découvert très récemment et je sens que je vais devenir accro. Grâce à un concours organisé par les Bibliothèques de Metz, j’ai découvert ce doux mot. Puis, par hasard, je suis tombée sur un recueil d’OuLiPo pendant mon récent repos (petite chronique à suivre bientôt) et pour finir, j’ai découvert un peu par hasard que s’est tenu cette semaine le premier colloque international consacré à l’Oulipo et qu’il avait lieu, en partie, à Metz, ville de tous les cadeaux. Mais qu’est-ce que c’est donc que cet OuLiPo ? Allez, commençons donc par le berceau !

Qu’est-ce que l’OuLiPo ?

L’OuLiPo est un Ouvroir de littérature potentielle pour les mots. Groupe international de littéraires et de mathématiciens se définissant comme des « rats qui construisent eux-mêmes le labyrinthe dont ils se proposent de sortir », l’OuLiPo est une association fondée au 1960 par François Le Lionnais et Raymond Queneau. Elle compte aujourd’hui 34 membres dont 13 sont excusés pour cause de décès, alors que les 21 restants ne prennent pas de repos.

La littérature Oulipienne est une littérature sous contraintes, qu’elles soient mathématiques, phonétiques, syntaxiques, grammaticales ou littéraires, le but est de rechercher de nouvelles formes littéraires, sans que cela ne soit un fiasco.

Un café scientifique fort comme un expresso

En plus du colloque, se tenait le festival OuLiPo. Sachant que je ne pourrai pas aller à l’ensemble de ces rencontres, j’ai assisté au café scientifique qui a pris place dans un bistro. Le thème en était « Littérature et mathématique : la contrainte une aide à la créativité ? » animé par des membres de l’OuLiPo.

Ils ont donc commencé par nous faire une petite présentation de l’association, en précisant que le but de l’OuLiPo n’est pas de prétendre au chef-d’oeuvre, mais plutôt de rechercher de nouvelles formes littéraires et si possible avec brio. Ils se réunissent ainsi une fois par mois en comité privé afin d’échanger leurs idées et de travailler sur les différentes contraintes qu’ils ont imaginées en solo. Depuis 1992, existent aussi Les jeudis de l’OuLiPo. Il s’agit d’une lecture publique qui a lieu un jeudi par mois à la BnF, à 19h pour info.

Olivier Salon a commencé par nous présenter deux types de contraintes utilisées par les mathématiciens, mais sans laisser les autres sur le carreau :

  • le déplacement d’une structure mathématique vers un mode littéraire, et là, pour les non-initiés comme moi, il a fallu y aller piano
  • le beau présent, qui consiste, par exemple, à utiliser uniquement le nom et prénom d’une personne pour en faire un poème, une lettre d’insulte ou un texte rigolo.

Ils ont ensuite axé leur présentation sur l’aspect de la contrainte mathématique avec, par exemple, la contrainte du carré gréco-latin ou carré bi-latin, exploité par Georges Perec dans La Vie mode d’emploi et ce n’est pas du pipeau ! Qu’est-ce donc que ce carré rigolo ? Voilà l’explication de Perec lui-même, tiré d’un article écrit par Michèle Audin, que je vous offre sur une plateau :

Le plus simple, pour faire comprendre ce qu’est un bi-carré latin orthogonal d’ordre 10 et quelles peuvent en être les applications romanesques, est de partir d’un bi-carré latin orthogonal d’ordre 3.
Supposons donc une histoire en trois chapitres dans laquelle s’agitent trois personnages respectivement nommés Dupont, Durand et Schustenberger. Dotons ces trois individus de deux séries d’attributs : d’une part, des coiffures, soit un képi (K), un melon (M) et un béret (B) ; d’autres part, des choses (?) que l’on peut tenir à la main : un chien (C), une valise (V) et un bouquet de roses (R). Le problème est alors de raconter une histoire dans laquelle les trois personnages auront tour à tour ces six éléments mais n’auront jamais les deux mêmes. […]
[…] la solution du problème : dans le premier chapitre Dupont aura un képi et une valise, Durand un béret et des roses, Schustenberger un melon et un chien ; dans le second, Dupont aura un béret et un chien, Durand un melon et une valise, Schustenberger un képi et un bouquet de roses ; dans le troisième, Dupont portera un melon et des roses, Durand en képi promènera son chien et Schustenberger en béret coltinera une valise. Il ne restera plus dès lors qu’à inventer les histoires justifiant ces successives transformations.

Ainsi, « Dans La Vie mode d’emploi, ce ne sont pas deux séries de trois éléments, mais vingt et une fois deux séries de dix éléments qui sont ainsi permutées et qui déterminent les éléments constitutifs de chaque chapitre. » Perec a donc écrit ce livre (que je n’ai pas encore lu) avec un cahier des charges très précis, qui a déterminé son histoire, sa construction et la couverture du livre dito.

Une des bases importantes de l’OuLiPo, surtout pour les novices, est de savoir que la contrainte parle de la contrainte, de l’auto-référence, comme dit le dico. Ainsi, le livre La disparition, de Perec, parle de la disparition d’une lettre (ici la lettre e) ce qui est un lipogramme, un jeu de mots. Il est important de garder cela à l’esprit, car lorsqu’on lit pour la première fois un ouvrage OuLiPo, certains textes peuvent sembler obscur, ce que j’ai soulevé lors de cet échange, en essayant de ne pas donner l’impression d’être une barjo. Pourquoi, en effet, ne pas dire la contrainte, afin d’orienter le lecteur et lui offrir cette info ? Pour Olivier Salon, « la contrainte est un outil comme le stylo avec lequel on écrit. Si l’auteur estime que la contrainte n’est pas essentielle pour la compréhension de son texte, il n’a aucune obligation à la mentionner.« 

Les questions et les échanges ont été très enrichissants et la réunion s’est terminé avec, pour moi, une belle découverte de l’OuLiPo et de certains de ses membres et surtout, de nouveaux livres à découvrir illico !

Membres de l’OuLiPo présent au tableau

Sources (pour être réglo)

Une contrainte s’est glissé dans ce texte, j’espère sans trop d’accro ! Il vous faut maintenant la découvrir alors au boulot !

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