Un chemin qui pose question sur toutes les concessions que l’on fait pour continuer à se sentir en sécurité…
La quatrième de couv :
C’est un itinéraire qui commence au Pôle Emploi et s’y termine, aller-retour. Un retour à la case départ ? Sûrement pas : les expériences transforment, parfois — souvent — contre son gré la narratrice de ce parcours qu’on pourrait dire initiatique.
Plus qu’à la recherche d’un travail, on est ici à la recherche de soi, de ses limites, de ses désirs, et l’œil acéré d’Anne-Sophie Barreau ne lâche rien.
Avec lucidité, elle met à jour les ressorts du travail précaire : l’entretien et ce qui s’y joue en transparence, l’arrière-cour d’un fast-food, d’un magasin de vêtements, l’inquiétude des couloirs de bureau, la servilité, les tensions, les modifications, et les autres, les collègues, ceux qui subissent, ceux qui en réchappent, s’en accommodent ou changent de trajectoire.
Des rouleaux compresseurs invisibles sont en action. Ils vous demandent des résultats, vous font enfiler des uniformes trop grands, vous interdisent, vous obligent, vous laminent un peu plus chaque jour, c’est le contrat, CDI, CDD, et les sigles qui pèsent.
Anne-Sophie Barreau revient sur ses pas et examine ce trajet dans une écriture d’une grande maîtrise. Sans doute pour maîtriser aussi cette part d’incontrôlable qui fait qu’on perd de vue l’objectif à atteindre, lorsqu’on doit s’adapter, composer avec, tenir. Maîtriser la faille grandissante entre ce carcan et nos aspirations profondes. Et sous ces lignes, cette question décisive, à laquelle elle s’efforce de répondre : à quoi est-on réellement capable de renoncer ?
Mon avis :
Pour ceux qui sont déjà passés par Pôle Emploi, vous savez les difficultés rencontrées face à des fonctionnaires dépassés, une institution pas toujours au point pour accompagner les demandeurs d’emploi. Vous caser dans la nomenclature (ce qui revient souvent à ne pas être classé au bon endroit…), faire des entretiens réguliers pour juger des capacités et de la motivation à retrouver un emploi (pour ma part, j’ai eu un jour le « plaisir » de m’entendre commenter un match de foot, plutôt que de me « conseiller »…), l’actualisation tous les mois…
Dans ce cas, on part souvent seul à la recherche d’un nouveau poste. Et c’est justement lors de l’un de ces entretiens que l’auteur commence à se poser des questions sur ses envies, ses motivations… Alors elle déroule les expériences passées. Du Burger King au ministère des Affaires étrangères, elle passe en revue les codes vestimentaires qui obligent à s’adapter aux tailles disponibles, les menues humiliations quotidiennes des supérieurs, les violences latentes des clients ou des collègues…
Il y a bien sûr aussi des points positifs qui sont mis en avant dans ces expériences professionnelles. Mais il est surtout question ici du courage qu’il faut trouver un jour pour s’éloigner du chemin bien connu. « Ce que je tente aujourd’hui, c’est une échappée belle » nous dit-elle. « Bien au chaud dans un bureau, avec mes dossiers et mes petits chefs à détester, je serais sans doute en sécurité mais je ne connaîtrais certainement pas la montée d’adrénaline que procure soudain l’idée d’un sujet, et tout ce qui l’accompagne. » Un chemin pas facile à prendre. Un chemin que tout le monde ne peut pas se permettre d’emprunter. Mais qui pose question sur toutes les concessions que l’on fait pour continuer à se sentir en sécurité…
Extraits :
Détails :
Auteur : Anne-Sophie Barreau
Editeur : Publie.net
Date de parution : 10/07/2013
264 pages
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Un livre qui pose question et qui a l’air intéressant.
Il l’est !