Une phrase de 65 pages à lire d’une traite, sans reprendre son souffle, pour accorder un moment à un homme qui n’aurait pas dû mourir pour une simple bière !
Mais d’où t’es venue l’idée de lire ce livre ?
In Cold Blog a publié il y a peu un extrait qui m’a interpellé. Vous pouvez aussi découvrir son article sur ce même livre.
La quatrième de couv :
Quand il est entré dans le supermarché, il s’est dirigé vers les bières. Il a ouvert une canette et l’a bue. À quoi a-t-il pensé en étanchant sa soif, à qui, je ne le sais pas. Ce dont je suis certain, en revanche, c’est qu’entre le moment de son arrivée et celui où les vigiles l’ont arrêté, personne n’aurait imaginé qu’il n’en sortirait pas.
Cette fiction est librement inspirée d’un fait divers, survenu à Lyon, en décembre 2009.
Mon avis :
Prenez une grande inspiration, assurez-vous d’avoir le temps nécessaire pour lire ces pages d’une traite et plongez dans cette phrase longue de 65 pages. Aucun point pour vous permettre de reprendre votre souffle, aucun paragraphe pour quitter l’espace d’un instant l’horreur de ce que vient nous raconter Laurent Mauvignier. Parce que dans ce texte, point de bons sentiments ou de happy end. C’est de la réalité qu’il vient nous parler. Celle sans fard qui fait souvent les entrefilets des journaux. Car c’est de violence gratuite que nous parle ce livre. A partir d’un fait divers, Laurent Mauvignier a pris la liberté d’inventer un passé, des pensées, un futur qui aurait été possible à cet homme mort pour une bière.
Mort pour une bière… Mort car cet homme, entré dans le supermarché pour se promener, a pris une bière sans réfléchir dans les rayons et l’a bu, là, sur place, tellement il avait soif. Les vigiles interviennent alors directement et, contre toute logique, se défoulent sur un homme déjà moralement à terre. Alors, pour redonner une voix à cet homme qui avait déjà beaucoup souffert, Laurent Mauvignier met en scène un narrateur qui s’adresse au frère de cet homme mort pour une bière. Il imagine les derniers instants, la détresse, l’incompréhension face à cet acte gratuit.
Comme le dit In Cold Blog, il n’y a pas de démagogie dans ce livre, seulement la volonté de dénoncer ces actes qui se banalisent, sur lesquels on s’arrête le matin pendant deux minutes le temps de lire l’article, avant de les oublier aussi vite, comme si l’accumulation de ce type de faits suffisait à les rendre tellement anodin qu’on n’aurait plus besoin de s’en inquiéter. Alors pour marquer le coup, une seule phrase, pour que vous ne puissiez pas reprendre votre souffle, que vous ne puissiez pas faire autre chose que suivre ce texte du début à la fin, pour accorder un peu d’importance à cet homme qui n’aurait pas dû mourir pour une bière.
Extrait :
Un premier extrait a été publié dans l’extrait du mardi.
Lire les premières pages sur le site des Éditions de Minuit.
Détails :
Auteur : Laurent Mauvignier
Editeur : Les Éditions de Minuit
Date de parution : 03/03/2011
64 pages
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Les Editions de Minuit sont exigeantes avec leurs lecteurs et proposent des textes pas toujours faciles.
Oui, c’est vrai que les textes proposés sont à part. Et là, c’est une belle prouesse de tenir 65 pages sans un seul point !
J’ai hâte qu’il soit à la biblio !
J’en fait un livre voyageur. Rendez-vous dimanche !
C »est un écrivain unique,il construit une oeuvre littéraire très forte…un grand monsieur!
Il faut lire la foule,des hommes, on ne sort pas indemne de ces lectures, mais c’est un auteur qui nous rend « meilleur », par le regard qu’il nous oblige à porter sur le monde.
Oui, j’ai noté déjà ses autres titres, car je compte bien continuer à découvrir cet univers particulier.
Tu n’imagines même pas à quel point tu me fais plaisir… ni même combien je t’envie d’avoir encore à découvrir les précédents textes de Mauvignier.
Si, j’imagine le plaisir que ça fait de donner envie aux autres de découvrir un auteur qu’on aime particulièrement. Ce n’est jamais facile, tant les goûts sont différents et les rencontres peuvent être manquées, mais quand ça arrive… 🙂