Tout cela, parce que je viens d’un pays de frontières, d’un lieu qui n’est que de passages fait de terres qu’on envahit et qu’on traverse en y laissant à chaque fois des tombereaux de soi, je suis d’un pays qui n’a peut-être même pas de langue propre, de langue à lui, et moi dedans, avec ma langue désapprise et puis cette autre avalée après que la première ait été perdue, je ne sais plus à force de quelle terre je suis, et puis comment je dois parler, comment je dois écrire, je ne sais même plus, quand je m’en vais ailleurs, derrière d’autres frontières, d’autres traits sur les cartes, marcher sur d’autres terres, je ne sais même plus donc où est vraiment ma langue et si celle que j’aborde lorsque je suis ici ou là n’est pas en fait la mienne, celle dont j’ai si vague connaissance.

Langue – Daniel Bourrion

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