Premier roman de Philippe Claudel, il y évoque la perte d’un être cher, le deuil et le temps qui fait son œuvre.

Mais d’où t’es venue l’idée de lire ce livre ?

Parce que c’est Philippe Claudel, tout simplement. Et parce que j’ai trouvé cet exemplaire chez le bouquiniste.

La quatrième de couv :

« Des jours durant, j’ai décliné le visage et le nom : « Paule, ma Paule, ma petite Paule du bord de mer, du centre des terres sous les volées d’orage, des soirs de Gand et de Lille », j’ai brassé ses cheveux et sa nuque, ses épaules et ses cuisses, le rire dans les yeux, et je tentais de l’unir, ma Paule en allée, à l’impossible mot… morte, morte, morte…»
Face à la perte de Paule, le narrateur fuit les lieux où ils ont vécu et finit par s’installer dans le village de Feil, sur la Meuse. Dans ces paysages nostalgiques et cette atmosphère brumeuse, la présence de Paule devenue obsédante se mêle aux souvenirs d’une enfance douloureuse.

Dans Meuse l’oubli, Philippe Claudel évoque avec talent le renoncement et l’acceptation du deuil, et restitue avec justesse et pudeur cette souffrance que seul le temps atténue.

Mon avis :

Paule est morte. Paule pleine de vie, de sourires et d’envies s’est éteinte. « Je vivais dans l’incommensurable amour de Paule, comme s’il s’était agi d’un pays » nous dit le narrateur. Alors, quand elle disparaît, c’est son monde qui disparaît en même temps. Perdu, errant d’un café vers un verre d’alcool, d’une oreille attentive vers l’indifférence de ses proches, le narrateur préfère partir. Quitter tous ces endroits qui lui rappellent tant celle qu’il a aimée, les lieux où ils étaient heureux. « Dans ma fuite, Paule ne m’avait pas quitté. J’avais roulé des centaines de kilomètres, sans trop savoir vraiment. »

Mais, « il a bien fallu que je m’arrête un jour. C’était à Feil… J’ai compris là que c’en était fini de la Terre de Paule ». Alors c’est au fin fond de ce petit village oublié de la Meuse qu’il va vivre son deuil. Hébergé par une vieille veuve, il va d’abord le vivre replié sur lui-même, renonçant à toute ouverture sur le monde extérieur, passant par toutes les phases de déni, de colère et de désespoir. Mais tout doucement, il va se relever, pas à pas, sourire après sourire. Les villageois, par leur discrétion et leur attention, vont l’aider chacun à leur manière à réapprendre à vivre et à aimer.

Première livre de Philippe Claudel, il y évoque avec beaucoup de délicatesse la perte d’un être cher et ce « temps, qui apporte la peine [et qui] se charge aussi de l’adoucir et c’est un curieux effet de le voir travailler à nous détruire avant que de nous soulager ». Pourtant, j’ai moins apprécié ce roman que Les âmes grises, Le rapport de Brodeck ou La Petite Fille de Monsieur Linh. Le style semblait forcé parfois, avec un brin d’envolée lyrique qui me gênait. Un défaut de premier roman qui a été totalement gommé par la suite.

Détails :

Auteur : Philippe Claudel
Prix : Prix Erckmann-Chatrian, Feuille d’Or de la ville de Nancy
Éditeur: Folio
Date de parution : 13/04/2006
157 pages

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